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Si je n'ai pas encore fait de commentaire sur cette photo, c'est parce que j'avais trop de souvenirs
et pas toujours heureux....
Je revois ma mère et tous ceux qui nous disaient au-revoir, les larmes sur les visages, lorsque que
nous avons quitté le port de Béni-Saf, le jour, je m'en souviens plus, mais c'était une belle journée ensoleillée de mai 1962....Ma mère m'avait confiée à ma cousine Clotilde et son mari Eugène.
Je serrais ma poupée contre moi (que j'ai toujours d'ailleurs), j'avais peur mais je ne comprenais rien...J'entendais autour de moi "il faut partir "....
Le bateau a remonté toute la côte espagnole et nous n'avions pas toujours été bien accueillis....parfois même, on ne pouvait pas descendre à quai. Mais gracieusement, les
autorités espagnoles nous apportaient de la nourriture et de l'eau, et le curé faisait la messe, lui sur le quai et nous sur le chalut. Les émigrés, c'étaient tout simplement, nous, pire que çà, on nous prenait pour des terroristes.
Mais sur le chalut, il y avait une très bonne ambiance...je ne me rappelle pas de tous les noms, mais j'étais avec ma cousine Clotilde, son mari Eugène Garcia et Sauveur, le frère de ma cousine.
La cuisine était bonne, faite par les marins. ils nous avaient donné leurs couchettes et eux dormaient sur le pont.
Une toilette avait été improvisée sur le pont du bateau avec des pans de tissus.On était à l'étroit mais personne ne se plaignait.
Nous avons subi une terrible tempête,, qui nous a obligé, de jeter par dessus bord,
matelas, meubles..le peu des "choses" que certains ont voulu prendre comme des reliques,
tout ce qu'il faillait pour alléger le bateau, je me rappelle de la panique soudaine des marins...
Le ciel était tout noir et les vagues étaient impressionnantes et s'écrasaient sur le pont. On nous avait descendre dans la cale et le chalut tanguait comme un fétu de paille...Il y en a eu des signes de croix cette nuit-là !
Mais je pense que du haut de mes 11 ans, je n'ai pas vraiment réalisé la gravité de la situation.
Il y a eu aussi des moments exceptionnels, nous avons pu ainsi voir des dauphins, des poissons volants, des bancs incroyables de sardines qui brillaient comme de l'argent....des images inoubliables!
Arrivés à Port-Vendres, le premier contact (d'ailleurs il se voit très bien sur la photo), ce fût le CRS.
Et oui...fallait vérifier ! Je suis sur le pont et je regarde la foule des curieux qui grossissait à vue d'oeil...il faut dire, qu'à défaut d'être le bateau d'Ulysse, nous étions plutôt le boat people de l'époque, un vrai capharnaüm... Après tout ce que nous avions subi, tout était sans dessus -dessous.
Mais quelle joie dans nos coeurs, de retrouver la terre ferme et surtout la France.
Heureusement, ma famille a trouvé très vite un logement, une belle maison appartenant un ancien armateur "la Maison Nadal".
Et puis, maman nous a rejoint quelques jours plus tard....les mains vides, elle n'avait rien pu "sauver" de ses souvenirs...que des photos.
Et nous avons commencé à revivre...
Mais, tu sais, ma chère Lisette, nous, nous avons été chanceux. Après notre arrivée à Port-vendres, il y a eu encore beaucoup de Pied-Noirs qui ont débarqué, des centaines et des centaines...la ville a été débordée, et faute de logements, ils ont passé tout un hiver sous des tentes....Celà a été, tant un échec pour l'Etat Français , qui ne s'attendait pas à ce rapatriement qu'un drame pour ces Pieds-Noirs qui avaient tout perdu.
Voilà, pourquoi, tant de Pieds-Noirs se trouvent dans le SUD, mais aussi,je pense comme disait maman, pour continuer à vivre sous le soleil !
Cordialement
Chantal RAMIREZ-PONCIN
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